Réforme du lycée : présentation et analyse

Effectif dès 2020, la réforme du lycée à réussi tant bien que mal à s’implanter comme nouveau système d’enseignement du secondaire supérieur. Cette refonte du lycée a introduit des nouveautés dans chaque classe du lycée, permettant ainsi aux élèves de pouvoir construire leur propre chemin vers l’enseignement supérieur.

Quelles ont été les principales nouveautés de cette réforme dans chaque classe de lycée ? Qu’en dit le rapport Mathiot remis au ministre de l’Éducation nationale ? Cet article présente les principaux changements que connaissent les classes de Seconde, Première et Terminale, et en propose une analyse.

 

Une nouvelle organisation

La mesure la plus retentissante de la réforme du lycée est bien entendu la fin des filières, dans la mesure où celle-ci affecte matériellement l’organisation complète des lycées. Le Lycée général était marqué jusqu’ici par une certaine prépondérance des Mathématiques, discipline où excellent en général les Français (et procurant à nos Grandes Écoles une reconnaissance internationale). Il en découlait un certain biais élitiste poussant tous les bons profils – scientifiques comme littéraires – vers la voie S. Ainsi les Mathématiques ne deviennent qu’un enseignement de spécialité parmi douze autres dès la classe de Première : les élèves pourront faire leurs choix en fonction de leurs affinités et leurs objectifs sans craindre de se retrouver dans une « mauvaise classe » ES ou L.

Le nouveau Lycée valorise désormais certaines disciplines parfois négligées que l’on retrouve pourtant dans les filières les plus sélectives et prestigieuses (Lettres et Philosophie en Khâgne, Géopolitique en ECS, SVT/Biologie en BCPST etc.). Les lycéens pourront, à l’issue de la Seconde, sélectionner les matières qu’ils souhaitent approfondir sans être pour autant catégorisés.

Ce mécanisme devant disparaître avec la réforme, les premières années d’application de la réforme du lycée montrent un remaniement de certaines matières jugés comme propice à l’admission aux études prestigieuses (les Mathématiques, la Physique Chimie et la SVT étant la première combinaison demandée chaque année depuis la mise en place de la réforme et représentant respectivement 64%, 43% et 48% des choix des élèves rentrant en Première).

Plus généralement, la réforme du lycée prend en compte des problématiques en apparence « simples » : notamment uniformiser le niveau des lycéens dans les matières fondamentales telles que le Français, les Mathématiques et les langues vivantes. Les élèves doivent impérativement bénéficier à la sortie du Lycée de très bonnes capacités rédactionnelles et de réflexion. La réalisation de cette ambition passe par la constitution d’un tronc commun pertinent et d’un objectif clair de sensibilisation des jeunes à la culture humaniste et scientifique. Afin d’accompagner les lycéens au sein de cette nouvelle organisation, une attention particulière est accordée à une implication des établissements du Supérieur au sein du Lycée. La réforme devrait introduire des cours de découverte de disciplines, des interventions d’universités et écoles, voire des stages d’immersion et de découverte professionnelle dès la Seconde. Les établissements devraient a priori disposer d’une certaine autonomie dans la mise en place de ces mesures.

 

La Seconde comme classe d’accueil

La classe de Seconde est expressément décrite comme endossant un double rôle d’accueil et de stimulation. Le premier semestre permettrait donc aux jeunes lycéens de prendre leurs marques et d’adopter un nouveau rythme de travail. L’enjeu pour les enseignants sera principalement d’appréhender le niveau souvent hétérogène des classes et donc de permettre aux élèves les plus fragiles de se remettre à niveau et à leurs camarades d’avancer quant à eux à un rythme plus soutenu. Par ailleurs, au cours de la seconde quinzaine de Septembre, l’ensemble des élèves de Seconde sera soumis à un « test de positionnement » comprenant une épreuve de Mathématiques et de Français. Ce test numérique constitue le premier élément de l’accompagnement personnalisé et permettra aux enseignants de s’adapter au niveau de leurs classes.

Le test de Français se déroulera en un temps imparti de 50 minutes et évaluera les compétences suivantes :

L’épreuve de Mathématiques aura de même une durée de 50 minutes et s’articulera autour des domaines suivants :

Tant en Français qu’en Mathématiques, le processus est majoritairement adaptatif. Ainsi, après une première série d’exercices, l’élève est orienté vers une seconde série en fonction de ses résultats. Les réponses aux questions ne nécessitent pas de rédaction.

Il est évidemment important que les élèves abordent la classe de Seconde avec le plus grand sérieux possible pour les raisons suivantes :

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Le Cycle Première/ Terminale

C’est lors du « Cycle Terminal » (i.e. les quatre semestres de Première et Terminale) que les élèves vont progressivement affiner leurs choix d’orientation et approfondir les matières correspondant le plus à ces derniers. Rappelons que jusqu’ici le BAC S rassemblait 52% des élèves de filière générale et 40% d’entre eux n’envisageaient pas de poursuivre un cursus scientifique. Afin de mettre fin à ce choix presque obligé de la série S, le nouveau Lycée entend favoriser une personnalisation du parcours qui s’organisera autour de 3 unités que nous allons nous attacher à détailler ci-après.

 

DE NOUVEAUX PILIERS D’ENSEIGNEMENTS

Les trois années de Lycée (et particulièrement le cycle Première / Terminale) seront désormais organisées autour de 3 unités :

  1. L’unité générale : elle constitue le tronc commun à tous les lycéens, décrite par le rapport Mathiot comme constituée d’enseignements « relevant de la culture de l’honnête homme ».
  2. L’unité d’approfondissement et de complément : elle regroupe les nouveaux enseignements de spécialité choisis par les élèves ainsi que les options.
  3. L’unité d’accompagnement : c’est la nouveauté de la réforme du Lycée dont les modalités pratiques ne sont pas encore totalement précisées. L’unité d’accompagnement correspondrait à un volume horaire dédié à la préparation des élèves à la poursuite d’études supérieures.

Les unités d’enseignement en Seconde

Sans grande surprise, l’unité d’enseignement général accapare la majeure partie du temps (26 heures) des élèves de Seconde.

Le programme s’avère pluridisciplinaire et plutôt équilibré. A noter l’introduction d’un module d’enseignement des sciences numériques et technologiques qui devrait fournir aux élèves les bases de programmation de langages informatiques et algorithmiques et les sensibiliser à la collecte et l’utilisation des données numériques, le rôle des réseaux sociaux etc.

Le Français occupe par ailleurs le premier poste de volume horaire (avec les Mathématiques) en vue de la préparation des épreuves anticipées du Baccalauréat. Le programme attache une grande importance à la consolidation et au renforcement des acquis grammaticaux, syntaxiques et lexicaux afin de donner à l’ensemble des lycéens une aisance orale et écrite en Français. Les professeurs effectueront un travail autour d’un corpus littéraire s’inscrivant dans les thèmes suivants :

Les Mathématiques pures seront enseignées de manière magistrale uniquement en classe de Seconde. Le programme s’articulera autour de cinq grands chapitres :

Ce programme entend bien entendu consolider les acquis du Collège et préparer les choix d’orientation des lycéens pour l’unité d’enseignement d’approfondissement.

Le programme d’Histoire entend quant à lui synthétiser les « Grandes étapes de la formation du monde moderne » alors que le programme de Géographie s’articulera autour de la notion d’« Environnement, développement, mobilité : les défis d’un monde en transition ». Fait intéressant : contrairement aux Mathématiques, l’Histoire-Géographie demeure obligatoire jusqu’en Terminale. Preuve que la réforme du lycée atténue l’hégémonie des Mathématiques, matière que les élèves devront choisir délibérément en cycle terminal. Le tronc commun de la  Seconde ne néglige néanmoins pas les disciplines scientifiques en accordant 3 heures à la Physique Chimie et 1h30 à la SVT.

L’enseignement de la SES permettra aussi aux élèves de se confronter dès la Seconde à des problématiques économiques et sociologiques, ce qui devrait les aider dans leur orientation. Enfin, les élèves de Seconde auront l’opportunité de choisir des enseignements optionnels : ils pourront suivre 1 ou 2 options et une troisième pour les étudiants latinistes ou hellénistes (Langues et Culture de l’Antiquité : Latin ou Grec).

Les unités d’enseignement en cycle terminal

L’unité d’enseignement général apparaît toujours comme celle dispensant des enseignements élémentaires à tous les lycéens. Le rapport Mathiot vise particulièrement six domaines de compétences :

L’enseignement classique des disciplines scientifiques est par ailleurs évacué du tronc commun et laisse place à un module d’enseignement scientifique concentré autour de quatre thématiques (matière, soleil, terre, son et musique).

Dès la rentrée 2023, l’enseignement scientifique sera marqué par la réintégration d’une heure et demie de Mathématiques en tronc commun. Cette intégration tardive permettra aux élèves n’ayant pas choisi la spécialité Maths de pouvoir bénéficier d’un enseignement général, leur permettant ainsi de prendre l’option Maths complémentaires en Terminale. Une bonne opportunité pour avoir la chance de peser dans la procédure d’admission à une filière sélective requérant le suivi de cours de Mathématiques.

Les modalités d’enseignement du Français devront quant à elles demeurer les mêmes dans la mesure où les épreuves anticipées de Français conservent leur architecture actuelle. Le principal défi pour les Lycées sera d’organiser les classes d’élèves, puisque seulement 17h30 d’enseignements ont lieu en commun.

L’unité d’approfondissement sera au cœur des questionnements des lycéens. Ils devront choisir parmi douze matières trois enseignements de spécialité en Première (3 x 4 heures) puis en conserver seulement deux en Terminale (2 x 6 heures). Un des enseignements de spécialité sera donc abandonné en fin de Première. Les deux autres seront poursuivis en Terminale.

 

LES DOUZE ENSEIGNEMENTS DE SPÉCIALITÉ 

C’est donc dans cette unité d’approfondissement que l’on retrouve les disciplines scientifiques prépondérantes. D’autant plus que les Mathématiques pourront être renforcées par une option Mathématiques expertes en Terminale. Une option Mathématiques complémentaires est également proposée à tous les élèves, dont ceux ayant abandonné la spécialité Mathématiques en Première. Un enseignement de spécialité pourra également renforcer l’Histoire-géographie, déjà présente dans le tronc commun. Il en va de même pour la Philosophie que l’on retrouve dans l’enseignement Humanités, Littérature et Philosophie. On retrouve dans cette large proposition d’enseignements de spécialité les prémices de l’enseignement supérieur et il est facile de se figurer des découpages plutôt littéraires ou scientifiques. Les enseignements peuvent en outre – comme en Seconde – être complétés par des options :

Le ministère a par ailleurs publié les statistiques de choix d’enseignement de spécialité formulés par les lycéens intégrant une classe de Première en Septembre 2022.

 

LES DOUZE COMBINAISONS LES PLUS FRÉQUEMMENT CHOISIES PAR LES ÉLÈVES

Les Mathématiques seules et la combinaison scientifique répliquant la maquette de la Première S arrivent très largement en tête de ce classement. Les disciplines scientifiques apparaissent encore comme des valeurs refuge du Lycée. Il est aussi intéressant de constater un certain succès des Sciences Économiques et de l’Histoire-Géographie, Géopolitique et Sciences Politiques. La SES devance d’ailleurs peut-être l’Histoire dans la mesure où cette dernière est déjà présente dans le tronc commun.

Enfin, l’unité d’accompagnement devrait représenter un volume horaire sanctuarisé afin d’initier une réflexion sur l’orientation (54h dès la Première). Bien que le nouveau Lycée s’organise pour accompagner les élèves, il est primordial pour chacun d’entre eux d’adopter une démarche active et de multiplier les opportunités d’échanges au sujet de leur orientation.

Un nouveau rythme en expérimentation

Cette fin des filières et le passage à une articulation en unités d’approfondissement ont amené le rapport Mathiot à proposer un rythme semestriel. Plusieurs lycées adoptent cette recommandation depuis l’application de la réforme.

Une organisation en semestres apparaît plus pertinente en face de la nouvelle architecture en unités du Lycée tournée vers l’enseignement supérieur. En effet, l’organisation trimestrielle ne convient plus forcément dans la mesure où les résultats du premier trimestre arrivent trop vite en Seconde et Première. Et le troisième trimestre souvent tronqué est peu utile pour l’orientation en classe de Terminale. Un passage au rythme semestriel permet non seulement d’adopter la même nomenclature que l’enseignement supérieur et surtout d’inscrire le travail des élèves dans une certaine continuité. Ils pourront ainsi disposer d’un plus grand nombre d’évaluations afin de mieux appréhender leur progression, que ce soit en vue de Parcoursup ou de l’examen du Baccalauréat.

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