Pourquoi faire une prépa ? Épisode 3. Tout savoir sur la prépa littéraire

 

Rituel de passage

La prépa permet chaque année à certains étudiants d’accéder aux Grandes Écoles (de Commerce et d’Ingénieur notamment) à l’issue d’une préparation rigoureuse et minutieuse d’épreuves écrites et orales. Cette orientation est ouverte à tous les lycéens, pourvu qu’ils soient studieux, et ne doit pas être confondue avec une voie élitiste fermée. Au contraire, la prépa aspire à mettre sur un pied d’égalité tous les élèves en les confrontant à l’épreuve impartiale du concours. Troisième épisode de notre série « Pourquoi faire une prépa ? » avec la prépa littéraire.

Rite de passage vers la maturité intellectuelle, la prépa laisse une trace indélébile à chacun des étudiants passés parmi ses rangs. Cette expérience révèle indubitablement vos qualités mais permet aussi de se révéler : rigueur d’esprit, méthode, discipline de vie et implication sont primordiales ; des qualités prisées aussi bien par les meilleures universités ou Grandes Ecoles que par les recruteurs futurs. Loin de constituer un moment aisé de la vie estudiantine, la prépa est pourtant une période de justice et de justesse : son dénouement – le concours – reste le procédé ultime témoignant du fruit d’un travail constant et d’une motivation sans faille, ainsi que de la capacité à articuler l’ensemble des enseignements reçus au cours de ces deux années cruciales.

 

L’ascèse

Les classes préparatoires initient une introspection et l’établissement d’un nouveau mode d’organisation. Il s’agit pour l’étudiant de rechercher un équilibre physique et psychologique, garant d’une plus grande capacité d’absorption intellectuelle ainsi que de réflexion : celui-ci repose notamment sur une bonne coordination entre les cours magistraux, le travail personnel, ainsi qu’un temps minimal de loisirs utiles (sport, lecture, activités artistiques et culturelles…)

Cette réorganisation représente dès lors un passage brutal vers une ascèse de vie rigoureuse au sortir des années lycée moins exigeantes, même au sein des établissements les plus prestigieux.

L’étudiant apprend ici à déployer des capacités de résilience durables qui seront capitales jusque dans sa vie professionnelle. Un (ancien) préparationnaire se distinguera par une organisation parfaite, une priorisation rationnelle des tâches et des objectifs, et enfin une grande persévérance même dans l’exécution de tâches laborieuses. Certains d’entre eux vous diront qu’après avoir bravé le stress d’une khôlle d’anglais, le froid des concours blancs de novembre, des notes résumées à des chiffres plutôt que des nombres, ils peuvent tout affronter car ils sont passés par là.

 

Le champ des possibles

À la résilience psychologique et physique vient s’ajouter un bagage intellectuel diversifié et unique. Les classes préparatoires visent à créer des têtes bien faites et bien pleines d’arguments et d’idées, que le préparationnaire se devra d’articuler de manière libre et cohérente afin de convaincre son correcteur. Tout étudiant doit appréhender et assimiler son environnement économique, géopolitique et culturel : le contenu magistral de la prépa offre aux élèves les clefs pour penser la conjoncture actuelle, héritage d’un corpus théorique et d’événements passés.

Cette étape est une acmé intellectuelle dont la subtilité n’est souvent saisie qu’après coup, une fois le concours réussi. Enfin, cette gageure procure aux étudiants une vélocité décisionnelle et une aptitude d’analyse structurée et argumentée, qui font parfois défaut à certains de leurs homologues, notamment en entreprise.

 

Se préparer à la prépa

Ainsi tout lycéen se destinant à l’intégration d’une classe préparatoire se doit de préparer ce passage vers cette branche si particulière du supérieur. Cela passe tout d’abord par la constitution d’un excellent dossier scolaire dès la Première – voire la Seconde. Le candidat devra également se consacrer à une assimilation du programme de lycée animée non seulement par la volonté d’obtenir de bonnes notes mais surtout par l’intention de n’accumuler aucune lacune en vue de cette orientation sélective.

Nous nous attacherons donc, au cours de cette série en trois temps, à revoir les principales voies s’offrant aux étudiants et à comprendre – dans la mesure des informations dont nous disposons – quelle serait la meilleure stratégie à adopter dans la sélection des enseignements de spécialité tant pour maximiser l’attrait du dossier que pour la constitution d’un profil adéquat à chaque filière. Dans cet article, nous présenterons les classes préparatoires littéraires.

 

Les classes préparatoires littéraires

Hypokhâgne et Khâgne A/L

L’Hypokhâgne est probablement la quintessence des études littéraires en France : elle ouvre en particulier les portes de la Rue d’Ulm (ENS Paris) et aspire à attirer les meilleurs profils littéraires à l’issue du Lycée. Après deux années de préparation intensive, les étudiants peuvent se présenter aux concours suivants :

  •  Les concours des Grandes Écoles littéraires à travers la BEL (Banque d’Épreuves Littéraires) :
    • Le concours lettres de l’École Normale Supérieure de Paris (rue d’Ulm) ;
    • Le concours littéraire de l’École Normale Supérieure de Lyon ;
    • Le concours langue étrangère de l’Ecole normale supérieure Paris-Saclay ;
    • Le concours de l’École Nationale des Chartes.

 

  • Les concours des Grandes Écoles de Commerce à travers la BCE (Banque Commune d’Épreuves), notamment les trois parisiennes (HEC, ESSEC et ESCP BS) de même que toutes les autres Écoles Supérieures de Commerce.

 

  • Les concours, après redoublement de la Khâgne et obtention de l’équivalence Licence (BAC+3) ou l’obtention d’une Licence 3 à l’issue de deux années de prépa et d’une année d’université, pour l’intégration de Sciences Po Paris, d’un IEP de province ou du CELSA.

 

  • D’autres formations diverses :
    • L’Université Paris Dauphine ;
    • École spéciale militaire de Saint Cyr ;
    • École du Louvre ;
    • L’ISIT (Institut de management et de communication interculturels) ;
    • L’ISMaPP (Institut supérieur du management public et politique) ;
    • L’ESIT (École supérieure des interprètes et traducteurs) ;
    • Les quatre grandes écoles de management de la banque d’épreuves Ecricome.

À noter que les étudiants doivent choisir pour leur année de Khâgne (i.e. deuxième année de prépa) entre Ulm et Lyon afin de respecter la nomenclature de la Banque d’épreuves littéraires (BEL). La première année d’Hypokhâgne constitue en effet une remise à zéro en langues anciennes (Grec ou Latin à choisir courant Septembre) et c’est à l’issue de cette première année que les étudiants devront conserver ou abandonner leur langue ancienne.

Ainsi, les étudiants ne poursuivant pas leur étude des langues anciennes sont orientés en Khâgne Option Lyon dont le concours est dit moderne et où l’épreuve de barrage porte sur la géographie contrairement à Ulm (destinée aux latinistes et hellénistes) dont le concours présente une épreuve de version en Latin ou en Grec.

Nomenclature Prépa Littéraire

 

La majeure partie des étudiants a en principe pour ambition d’intégrer une ENS, l’enseignement et/ou la recherche étant les principaux débouchés de ce cursus. Mais, 95% des étudiants échouant à intégrer une ENS, la BEL donne aux préparationnaires en Lettres d’autres options d’orientation et revalorise ainsi cette voie. L’intégration d’une école de commerce constitue donc une véritable alternative bien que l’Hypokhâgne et la Khâgne ne dispensent aucun enseignement en mathématiques. En effet, suite à l’intégration des étudiants, les Grandes Écoles mettent en place une remise à niveau et ces profils éminemment littéraires peuvent finalement s’orienter vers des carrières plus quantitatives (en stratégie, finance, management etc.)

Il n’en demeure pas moins qu’une Khâgne requiert expressément un bon – voire excellent – niveau dans l’ensemble des matières littéraires (Français, Philosophie, Histoire et Géographie, Langues Vivantes). En effet, les exigences s’avèrent élevées et équilibrées entre les différentes disciplines littéraires.

Volume horaire classes de première année : Lettres supérieurs

Volume horaire classes de deuxième année

 

En revanche, comme pour les CPGE Commerce, la filière khâgne reste ouverte à tous les profils, pourvu qu’ils soient brillants et comme le souligne Stéphane Coviaux (président de l’Association des professeurs de première et lettres supérieures) : « Notre principe général est qu’aucun choix ne fermera la moindre porte. Un élève, pas encore déterminé, qui aura choisi des spécialités scientifiques aura donc toute sa place dans nos filières ». A priori aucun enseignement de spécialité ne sera donc discriminant bien qu’il soit recommandé aux élèves de faire les choix les plus cohérents avec leur ambition d’école (Celsa, IEP, école de commerce, ENS).

La spécialité Littérature, langues et cultures de l’Antiquité (LLCA) de même que l’option Langues et cultures de l’Antiquité (LCA) demeureront toutefois l’orientation la plus naturelle afin de se constituer un bagage en humanités en amont de la prépa. Ceci dit, Stéphane Coviaux assure que « Aujourd’hui, la plupart de nos étudiants démarrent le latin ou le grec en première année de prépa, et arrivent en deux ans au niveau exigé. Cette préparation intensive se poursuivra. »

Une bonne maîtrise du Latin ou du Grec acquise dès le Secondaire constitue toutefois un avantage sensible dans la mesure où elle permet une maîtrise plus approfondie de la sémantique des sujets en Philosophie, Histoire, Géographie etc. et fournit donc aux étudiants un avantage pour comprendre certaines ambivalences et nuances. Ainsi, commencer l’étude du Latin ou du Grec de manière précoce ne peut être qu’un élément de discrimination positive, sans que cela soit rédhibitoire pour les élèves qui n’en auraient jamais fait.

 

Hypokhâgne et Khâgne B/L

La B/L est une classe préparatoire dite littéraire et pourtant étonnamment pluridisciplinaire et équilibrée. Les élèves issus de cette filière préparent en priorité les concours suivants :

  • Le concours B/L de l’École Normale Supérieure de Paris (rue d’Ulm) ;
  • Le concours Sciences Économiques et Sociales de l’École Normale Supérieure de Lyon ;
  • Le concours Sciences Sociales de l’ENS Paris-Saclay ;
  • Le concours Économie et Sciences Sociales de l’ENSAE ParisTech (École Nationale de la Statistique et de l’Administration Économique).

Les étudiants peuvent également se présenter aux concours d’autres Grandes Écoles par des voies dédiées :

  • L’option Lettres et Sciences Humaines des concours des Grandes Écoles de commerce (HEC, ESSEC, ESCP BS, EM Lyon, EDHEC, Audencia) ;
  • La procédure d’admission en Master 1 de Sciences Po Paris ;
  • Le concours Économie et Sciences Sociales de l’ENSAI (École Nationale de la Statistique et de l’Analyse de l’Information).

Encore plus largement pluridisciplinaire, l’Hypokhâgne et la Khâgne B/L sont fondées sur un principe d’égalité des matières. Elles croisent prépa littéraire et prépa HEC, conservant de la première des exigences purement académiques fortes, et, à ce titre, cette formation très exigeante est un oiseau rare au sein des prépas (très peu de Lycées en proposent). Il est en revanche certain que la plupart des étudiants de B/L effectuent de brillants parcours académiques et professionnels, souvent très variés.

Cette filière serait donc en principe ouverte à tous les lycéens mais elle requiert en réalité un très bon niveau, parfois discriminant, en Mathématiques (pondérées du même volume horaire que les sciences humaines).

Volume horaire prépa B/L

 

C’est pour cela, qu’à la différence de l’A/L, la spécialité Mathématiques sera inévitable jusqu’en Terminale. Il est essentiel que les élèves conservent au lycée, dans l’optique d’intégrer une B/L, le profil le plus équilibré et le plus complet possible. Par ailleurs, les enseignements Humanités, littérature et philosophie (HLP), Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (HGGSP), Sciences Économiques et Sociales (SES), Littérature, langues et cultures de l’Antiquité (LLCA) ou Langues, littératures et cultures étrangères (LLCE) peuvent être un plus.

L’École normale supérieure de la rue d’Ulm

L’École normale supérieure de la rue d’Ulm

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Ma vie en école – Entretien avec Thomas, étudiant à HEC et à l’Ecole normale supérieure, passé par la prépa commerce d’IPESUP

 

Quel a été ton parcours de lycéen ?

J’ai passé 3 ans au lycée Saint Dominique de Neuilly sur Seine en effectuant un baccalauréat scientifique spécialité mathématiques.

 

Pourquoi t’es-tu orienté vers une classe préparatoire aux Grandes Ecoles de Commerce ?

Ayant pour objectif à l’origine de faire de l’enseignement et de la recherche en astrophysique, je me suis aperçu pendant mes années de lycée que mon niveau en mathématiques et en physique serait probablement toujours insuffisant pour exceller dans le domaine un jour. Je me suis en parallèle découvert une passion pour la psychologie et la philosophie, et, voulant à la fois une classe préparatoire qui saurait exploiter mes points forts tout en gardant des mathématiques au programme et qui serait à terme un chemin pour rejoindre des études en sciences cognitives (ce que plusieurs écoles de commerce permettent en double diplôme), je me suis orienté vers une classe préparatoire ECE.

 

Comment se passe ta vie en école ?

Bien que marqué pour une bonne partie par l’épisode de la COVID-19, mon parcours au sein de l’école se déroule très bien : la rentrée a été marquée par l’apprentissage des traditions de l’école et la rencontre de nombreuses personnes et futurs amis ; en deuxième partie d’année, mon rythme de vie s’est ralenti alors que les cours passaient à distance. Cela m’a permis de commencer un projet entrepreneurial avec plusieurs amis – faisant suite à une réflexion commune développée en classe préparatoire –, au début accompagné par HEC, qui, aujourd’hui encore, me prend une partie importante de mon temps.

 

Participes-tu à la vie associative d’HEC ?

Mon implication a été très importante (et parfois un peu trop ambitieuse au vu de mes autres projets) ! Au sein d’HEC, j’ai pu co-créer ma propre association « Psych’HEC », une association de développement personnel et soutien psychologique : essayer de rassembler des personnes autour d’un sujet qui m’anime et me mettre dans une démarche active pour organiser des événements était très formateur et source de confiance en moi. Au-delà de cette expérience, j’ai pu participer à une campagne (gagnée) très prenante pour se faire élire au Bureau des Arts et m’engager un temps au sein de l’association « Fleur de Bitume » pour faire du tutorat à des élèves dans des collèges défavorisés.

 

Ton cursus prévoit-il des stages ou des séjours à l’étranger ?

Mon cursus prévoit au minimum 40 semaines de stages et 6 mois à l’étranger. Au sujet des stages, j’ai déjà pu travailler au sein de Rising Up, une start-up qui vise à utiliser un savoir de pointe en sciences cognitives et management pour faciliter la transformation humaine des organisations et aider à développer les compétences des individus (et je vais peut-être y rester cette année à temps partiel). Pour partir à l’étranger, je reste ouvert pour ma recherche de stages futurs et j’espère particulièrement pouvoir faire 6 mois de recherche en sciences cognitives dans un autre pays en master 2.

 

Quel est ton cours préféré ?

Sans hésiter, parce qu’il mérite d’être cité, le cours FACT Entreprenor (coanimé par les excellents Frédéric Iselin et Etienne Krieger). C’est un cours qui vise à inviter les étudiants, accompagnés par des coachs et un MOOC coconstruit avec Polytechnique, à effectuer les premières phases de la création d’une start-up (notamment en interrogeant des personnes pour mieux comprendre leur cible), pour éventuellement continuer à terme leur création si l’idée peut se concrétiser. C’est pour moi un cours très enrichissant car il invite à apprendre à chercher soi-même les informations dont on a besoin (sur un domaine qui a priori nous intéresse beaucoup) et à oser contacter les personnes nécessaires pour avancer dans la bonne voie. 

 

Quel est ton professeur préféré ?

L’ineffable Gilles Stoltz, professeur émérite de statistiques. Au-delà de polycopiés extrêmement détaillés et parfaitement rédigés ou de son envie contagieuse de développer l’esprit critique de ses élèves à travers son cours, son humour et sa bonne humeur difficilement égalables font de son cours un rendez-vous régulier très agréable.

 

Quelles sont à tes yeux les principales qualités de ton école ? 

Je vois trois qualités principales : le grand campus à la campagne (tout le monde n’aime pas, mais je trouve ça assez enthousiasmant de parfois voir passer une biche en rentrant dans sa chambre le soir), la solidité et la cohérence du tronc commun de cours, et la présence d’un réseau d’anciens très important et actif. Au-delà de ces atouts assez standards, la première édition du programme « Sens et Leadership » lors de mon année d’intégration m’a particulièrement enthousiasmé : ce dernier commence par quelques jours dans un très bel endroit en France (au Mont-Saint-Michel pour ma part), puis se poursuit avec la réalisation d’un mémoire de recherche sur le sujet du sens en entreprise en parallèle de conférences avec des intervenants très bien choisis ; même s’il reste des marges d’amélioration importantes, ce début d’engagement pour pousser les étudiants à réfléchir au sens de leur travail dans notre société me semble déjà fondamental.

 

As-tu une anecdote à nous raconter sur ta vie en école ? 

Je me rappelle simplement de cet instant de surprise que j’ai eu quand j’ai réalisé en début d’année que ma chambre était juste en face de la salle de soirée : déni, recherche de solution, puis acceptation… Certaines de mes nuits ont ainsi vu leur cours normal dévié par des chants gutturaux improvisés ou des danseurs au pas parfois un peu trop lourd !

 

Tu as rejoint l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm pour étudier les sciences cognitives, en quoi cette formation complète-t-elle ton parcours à HEC ?

C’est à l’ENS Ulm que se trouvent mes cours préférés : le contenu y est très poussé et un point d’honneur y est mis pour transmettre une méthodologie scientifique (pour savoir quoi penser sur un domaine et faire de la recherche). Cela me permet de continuer à développer de manière accompagnée mon intérêt pour la psychologie, la philosophie (de l’esprit), l’anthropologie, l’intelligence artificielle ou les neurosciences. A titre professionnel, l’établissement me forme à deux titres : il me prépare pour faire de l’entrepreneuriat dans le domaine des sciences cognitives (en se basant sur des connaissances solides) et il constitue un tremplin unique pour faire plus tard (voire en parallèle) de l’enseignement et de la recherche dans le domaine.

 

Que t’a apporté la prépa ? 

Je crois que le plus grand apport que je retire de ma classe préparatoire est qu’elle m’a poussé à développer considérablement ma capacité de travail et ma rigueur. De manière parallèle, j’en ressors également beaucoup plus capable de parler de manière structurée et spontanée sur n’importe quel sujet. Et au sujet du contenu, elle m’a permis de développer une culture générale très approfondie pour penser le monde contemporain. Enfin, et probablement l’élément le plus crucial pour ma vie future, j’y ai rencontré mes meilleurs amis et personnes avec lesquelles je crée mon projet entrepreneurial.

 

Quelles ont été ses spécificités ? 

Je trouve que le parcours permet peu à peu d’apprendre à bien se concentrer et à travailler plus efficacement : même déterminées, la plupart des personnes en début de première année essayent encore de trouver leurs marques (et ont du mal à travailler efficacement et longtemps), alors que le rythme de travail devient de plus en plus intense et naturel à mesure que le temps s’écoule. A partir de ce moment-là, j’ai pu réellement prendre plaisir à travailler avec des amis et à poursuivre un même but de manière constante. Et, constat le plus évident, cela reste très stimulant si l’on s’accroche de vraiment avoir à connaître pour la première fois une matière en profondeur, que ce soit les mathématiques, l’économie, la culture générale ou la culture étrangère.

 

Conseillerais-tu la prépa HEC d’Ipesup ? Si oui, pourquoi ? 

En règle générale, je conseille la classe préparatoire (dont la classe préparatoire commerciale) pour les élèves qui en ont l’envie et qui sont prêts à travailler (et qui ont un dossier suffisant pour être sélectionnés dans un établissement qui leur plaît). Pour la prépa HEC d’Ipesup en particulier, je pense que c’est un plutôt bon choix pour beaucoup de personnes assez autonomes et pour qui le prix n’est pas une barrière : les cours sont très bons, les professeurs ont une véritable connaissance de l’attendu des concours et cela reste un peu plus accessible que d’autres grandes prépas pour ce qui est du dossier.

 

Quels sont tes projets ? 

Je suis occupé par trois projets majeurs actuellement. D’abord, comme j’ai pu le mentionner, j’ai créé une start-up du nom de « DeepSelf », une plateforme RH intelligente qui se base sur des connaissances précises en sciences cognitives et théorie des organisations pour accentuer l’engagement en entreprise et accompagner les organisations vers des modèles plus humains et soutenables. Cela me conduit notamment à participer à des concours (Enactus Festival, AI For Tomorrow), accompagné par des coachs, et à rencontrer beaucoup de professionnels pour mieux comprendre leur quotidien et leurs problèmes. Par ailleurs, j’écris un livre sur l’intelligence artificielle en interrogeant des experts du sujet pour essayer de révéler le potentiel très important et les risques éthiques que cette technologie représente. Enfin, je suis activement engagé au sein de l’association Altruisme Efficace France, qui invite à réfléchir de manière rationnelle aux meilleurs moyens d’agir pour accroître son impact positif sur la société.

 

As-tu un mot à adresser aux lycéens et préparationnaires qui te lisent ?  

Au sujet de la classe préparatoire, encore une fois, n’hésitez pas à y aller si vous vous sentez prêts à travailler sérieusement et que votre dossier est potentiellement suffisant pour aller là où vous voulez ; pour les préparationnaires, simplement un message de courage, soyez fiers de votre parcours quoi qu’il en ressorte ! De manière générale, sans vouloir faire de référence un peu caricaturale à mon école, apprenez à oser : je ne parle pas seulement du domaine professionnel, ayez beaucoup d’ambition (et de compassion) pour la personne que vous êtes et que vous voulez devenir !

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Quatre grandes étapes pour se préparer à Oxbridge

 

I. Anticipez pour bien enrichir votre profil personnel

Un dossier Oxbridge se prépare dès la classe de Seconde. Il vous faudra en effet dès cette année vivre des expériences et développer les compétences requises par le cursus convoité. Pour la médecine par exemple, il s’agira de faire des stages obligatoires. Pour Philosophy, Politics and Economics (PPE), il faudra avoir développé beaucoup de lecture personnelle, et éventuellement un engagement dans un partie politique ou du volontariat. En ingénierie il sera nécessaire d’avoir fait des stages et d’avoir développé des projets personnels en lien avec le cursus. Enfin, si vous envisagez de postuler en Computer Science il faudra être familier du coding et avoir un bon niveau en mathématiques.

 

II. La rédaction du Personal Statement

Toutes les universités d’élite ne donnent pas d’interviews. Celles qui le font utilisent le Personal  Statement (entre autres éléments du dossier comme les bulletins scolaires) pour les aider à décider qui convier.

Le Personal statement peut vous permettre de vous démarquer des autres candidats : c’est le seul élément de votre candidature sur lequel vous avez un contrôle total.

Ce court texte de 47 lignes doit être bien médité : chaque mot a son importance. Il faudra éviter le langage fleuri que n’apprécient guère les universités anglophones, proscrire les contractions et les fautes de grammaire.

En règle générale, les universités britanniques s’intéressent largement à l’individu qui postule, son parcours, sa personnalité. Dans le cas des universités d’élite, c’est surtout le niveau académique qui importe. Votre Personal Statement sera donc axé votre cursus académique, sans pour autant répéter ce qu’indiqueront déjà vos bulletins scolaires et vos lettres de recommandation.

Vous pourrez y montrer :

  • vos connaissances et votre curiosité
  • votre capacité à vous exprimer de manière claire et organisée
  • votre esprit critique

 

Que pouvez-vous inclure ?

  • Vos études actuelles
  • Vos centres d’intérêts et activités académiques
  • Les cours en ligne auxquels vous avez participé (par exemple des MOOCs)
  • Vos lectures et participations à des conférences
  • Vos visites de musées et galeries
  • Vos stages rémunérés ou non
  • Vos activités de volontariat
  • Les clubs et associations dans lesquels vous vous êtes investi
  • Activités liées aux compétences requises
  • Les activités sportives que vous pratiquez
  • Vos hobbies

 

L'université de Cambridge
L’université de Cambridge (King’s College)

 

Les étudiants qui postulent dans des universités de haut niveau sont donc censés fournir un travail académique bien structuré, comme l’explique la London School of Economics (LSE) sur son site web :

« Votre Personal Statement doit porter essentiellement sur votre intérêt académique pour la matière que vous souhaitez étudier. Une façon de réfléchir au Personal Statement est de réfléchir à ce que nous attendons des étudiants de premier cycle : nous leur demandons de s’informer sur des sujets en rapport avec leur cours, par la lecture ou d’autres expériences, puis de discuter des idées qu’ils ont abordées dans un essai. C’est la compétence que nous recherchons dans votre Personal Statement et nous recommandons qu’au moins 80 % de votre rédaction soit consacrée à ce type de réflexion académique. »

 

Pour vous aider dans la rédaction du Personal Statement, voici quelles questions vous pouvez vous poser :

 

  1. Pourquoi postulez-vous ?

Montrez de l’enthousiasme et de la motivation pour le cursus choisi

  • Pourquoi ce sujet vous intéresse (études antérieures et actuelles, intérêts et activités, cours en ligne gratuits)
  • Quelles sont vos ambitions à la fin de votre cursus

 

  1. Qu’est-ce qui vous rend apte à postuler ?

Démontrer votre compréhension du cursus choisi, et présentez vos expériences en lien avec le cursus choisi (des stages, un engagement citoyen pour PPE, etc)

  • Montrer que vous avez les traits de caractère nécessaires pour réussir
  • Tenez compte des aspects du sujet qui vous intéressent particulièrement et/ou débattez de points clés
  • Faites référence aux compétences et connaissances acquises, aux réalisations et expériences passées qui pourront vous aider à mener à bien votre formation avec succès (il peut s’agir d’études, d’un emploi ou d’une expérience professionnelle, ou encore de loisirs, d’intérêts et d’activités sociales.)

 

  1. Qu’est-ce qui vous distingue ?

Montrez de l’enthousiasme pour les matières du cursus désiré

  • Développez une pensée indépendante et originale
  • Évoquez vos lectures personnelles (celles qui sont les plus pertinentes !), votre participation à des événements, conférences, MOOC, ou votre engagement associatif ou civique.

 

  1. Quelles sont vos compétences et expériences les plus pertinentes ?

Faites le lien entre vos expériences/ compétences et les qualités que l’université recherche.

Les meilleurs candidats sont ceux qui parviennent à établir un lien entre leurs activités extrascolaires et le programme d’études qu’ils proposent.

 

III. Les examens et le travail soumis

Oxford et Cambridge imposent des examens d’entrée (LNAT, TSA, CSAT, UKCAT, NSAA, ECAA, STEP – la liste est longue) qui ont lieu en général autour d’octobre/novembre. Selon le cursus souhaité, ces épreuves peuvent avoir lieu en pleine période du Bac.

Votre candidature sera examinée exactement comme celle d’un candidat anglais, donc pour certains cursus tels les matières STEM il est nécessaire de se faire accompagner par un tuteur dès votre entrée en classe de Première pour vous mettre au même niveau qu’un étudiant de A levels (surtout en mathématiques, physique, chimie et SVT). Il n’existe aucune dispense liée à votre nationalité ou votre système d’éducation.

Certains cursus exigent par ailleurs que vous transmettiez une ou deux rédactions scolaires (misez sur un travail ayant obtenu une note supérieure à 16/20). Il convient de bien anticiper la préparation de ces rédactions, qui doivent être de 2000 mots environ : si tous vos DST ou DM sont beaucoup plus courts ou beaucoup plus longs que le format exigé, consultez vos professeurs et demandez-leur s’ils peuvent, exceptionnellement, accepter deux rédactions à la bonne longueur.

Choisissez des rédactions dans des matières en lien avec le programme choisi et qui vous enthousiasment (par exemple, si vous envisagez le cursus Human Social and Political Sciences, soumettez une rédaction en SES et une rédaction en HGGSP). Vous devez traduire vous-même votre rédaction en anglais et la soumettre avant la Toussaint avec une page de garde tamponnée par votre école.

 

IV. L’entretien

Cette étape décisive a lieu début/mi-décembre et a été longuement entourée de mystère et de légendes, mais depuis quelques années les deux établissements tentent de la démystifier. L’entretien reste néanmoins un challenge de taille. Sachez que vous serez uniquement convié à un interview que si vous avez passé toutes les étapes précédentes avec succès.

Vous passerez normalement au moins deux entretiens (il arrive que l’Université en fasse passer jusqu’à quatre).  A Oxford, il faut prévoir deux nuitées sur place (vous serez hébergé dans un Collège), à Cambridge une seule nuit suffit. Si vous n’avez pas eu d’examen d’entrée à passer vous aurez un examen court sur place avant l’entretien.

La veille de l’entretien, relisez de près votre Personal Statement et vos rédactions soumises.  Lors de l’entretien, les premières questions ont pour objectif de vous mettre à l’aise, mais montent rapidement en puissance. Dans les matières scientifiques, attendez-vous à une colle et à ce que l’on vous pose des questions de plus en plus complexes jusqu’à ce que vous ne connaissiez pas la réponse – l’idée étant de voir comment vous réfléchissez.

 

Présentation de l’interview d’admission à Oxford :

 

Présentation de l’interview d’admission à Cambridge :

 



Ma vie en école d’ingénieur post-bac. Entretien avec Charles, étudiant en deuxième année à l’ECE à Paris

Avant d’intégrer une école d’ingénieur post-bac, quel a été ton parcours de lycéen ? 

J’ai fait mes classes de Première et de Terminale à Prépasup à Paris, préparant un bac S spécialité mathématiques.

 

Pourquoi t’es-tu tourné vers une école d’ingénieur post-bac ? 

Depuis petit, je suis attiré par le bricolage et la mécanique. J’ai toujours aimé réparer des vélos, repeindre et réparer les objets qui ne fonctionnaient plus. J’ai aussi une passion, le modélisme. Il s’agit de miniatures d’engins mécaniques à moteur ou électriques comme les voitures télécommandées, les avions, les hélicoptères. Petit j’avais une miniature de voiture et un petit avion. Avec ces centres d’intérêt et mon goût pour les sciences il m’est apparu naturel de me tourner vers une école d’ingénieurs. Je ne me sentais pas les capacités de concentration et de travail pour rejoindre une classe préparatoire, alors j’ai envisagé les écoles d’ingénieur post-bac. 

 

Comment se passe la vie en école ? 

C’est très différent par rapport à la Terminale : on est libre de ce qu’on fait, on a plus d’indépendance. On travaille mais on travaille plus pour soi. Les horaires sont différents : en Terminale c’était parfois 8h-18h alors qu’en école on peut avoir des journées de 8h-20h puis cours uniquement le matin le lendemain, ça alterne. On travaille plus parce qu’on en a envie, alors qu’en Terminale, on travaille parce qu’on est contraint, notamment par les parents. En école d’ingénieurs, on aime, donc on travaille. On a à peu près 27 heures de cours par semaine en première année. 

Comme dans toutes les écoles, il existe de nombreuses associations où on peut faire du sport, défendre des causes comme l’écologie. Le jeudi après-midi est dédié à la vie associative. Pour ma part je suis dans le BDS (Bureau des Sports) en section tennis. L’école loue des terrains à l’année dans le 13e arrondissement et on peut aller y jouer. 

 

Ton cursus prévoit-il des stages ou des séjours à l’étranger ?

Les première et deuxième années sont des années de prépa intégrée. A partir de la deuxième année, on doit réaliser un stage obligatoire de deux mois minimum. Ceux qui ont les meilleurs résultats (et qui peuvent se le permettre) ont la possibilité de réaliser un séjour au Museum of Modern Art (MoMA) à San Francisco pour découvrir l’ingénierie artistique. En troisième ou quatrième année, on a la possibilité de faire six mois de stage à l’étranger. Le cursus se clôt sur un stage de fin d’études dans une entreprise, que les étudiants intègrent généralement par la suite.

 

Quels sont les qualités et les défauts de ton école ? 

Les qualités, ce sont les matières étudiées comme l’informatique et l’électronique. Le niveau est vraiment bon. Je peux mentionner un défaut, même si ce n’est pas très important : en première année, les étudiants sont dans le seul bâtiment qui n’est pas rénové. 

 

Comment se sont déroulés les concours ? 

Les concours des écoles d’ingénieur post-bac sont assez stressants à cause du temps imparti. Comme le temps est très limité, il faut bien le gérer et sélectionner les questions auxquelles on est sûr de pouvoir répondre. On n’a même pas 45 secondes par question, et quand elles appellent de grosses réflexions mathématiques il faut apprendre à aller vite.

L’anglais est plutôt difficile en concours, parce qu’il y a de nombreux pièges, comme en français d’ailleurs. En français, on est souvent confiant car c’est la langue qu’on maîtrise mais en réalité on est interrogé sur des règles de grammaire très précises qu’on ne connaît pas toujours à la lettre. C’est compliqué d’avoir plus de 10/20. Il faut s’entraîner pour essayer d’éviter les pièges.

 

ECE Paris et Lyon

 

Comment t’es-tu préparé aux concours ? 

On ne se prépare généralement pas avant la Terminale. J’ai préparé quatre concours : Puissance Alpha, Avenir, GEIPI/ Polytech, Advance. Dès la Toussaint et à toutes les vacances j’ai réalisé des stages avec Prépasup. Les concours ont lieu juste avant le bac, à Pâques, il faut donc bien s’organiser tout au long de l’année.

 

En quoi consistent ces stages de préparation aux concours ? 

Il s’agit d’entraînements sur les annales de concours des années précédentes. Ce n’est pas du cours classique comme en Terminale. On apprend à ne pas tomber dans les pièges. Si on ne se prépare pas aux concours, on tombe facilement dans les pièges.  

 

Qu’est-ce que ta préparation t’a apporté ? 

Elle m’a appris à savoir gérer le temps, à ne pas tomber dans les pièges tendus par le concours. Il ne faut pas oublier que c’est un concours, avec un nombre de places limité : l’examen il faut le réussir, alors que le concours il faut être parmi les meilleurs. 

La préparation aux concours Post-bac d’ingénieur, si on ne la fait pas, ça risque d’être compliqué. Si on la fait, il faut être à fond, et si on ne peut pas faire tous les stages, il est bon de choisir ceux qui sont près du concours. Après décembre, la préparation devient essentielle. 

 

Conseillerais-tu la prépa concours écoles d’ingénieur Post-bac de Prépasup ? 

A 100%, d’ailleurs je l’ai déjà fait. A ceux qui étaient en Première quand j’étais en Terminale j’ai conseillé ces stages pour les écoles d’ingénieur mais aussi pour les écoles de commerce car il y a l’équivalent en commerce, et ils les ont faits. 

 

Comment as-tu choisi ton école ? 

J’ai été admis dans pas mal d’écoles, et j’ai fait le choix de l’ECE à cause des matières qui m’attiraient, de la réputation de l’école et de sa localisation géographique (elle est à Paris, dans le 15e arrondissement).  L’école ne propose que quatre matières en prépa intégrée : maths, physique, informatique, électronique. Ce sont quatre matières que j’aime beaucoup, et qui permettent d’être bon et de ne pas se disperser.

 

Quels sont tes projets ? 

A court terme : réussir mes cinq années, trouver un master qui me convienne, puis faire un master commercial dans une Grande Ecole pour avoir un double diplôme ingénieur / commerce, cursus recherché sur le marché du travail, puis devenir manager sur des projets liés à l’aéronautique, la cybersécurité, ou l’automobile.

 

Qu’est-ce qui fait un bon ingénieur selon toi ?  

Le propre d’un ingénieur c’est de savoir s’adapter. Quand il y a un problème, il faut savoir le résoudre, et s’il est inédit, il faut savoir s’adapter, créer les outils pour le résoudre.

 

Merci à toi Charles Thiolon d’avoir accepté cet entretien !

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  • Ma vie en école d’ingénieur post-bac. Entretien avec Charles, étudiant en deuxième année à l’ECE à Paris
  • L’épreuve du « Grand Oral » dans le nouveau baccalauréat 2021 : ses modalités pratiques, ses exigences et ses enjeux

    On sait que le philosophe Platon, dans son dialogue du Phèdre, mettait en garde contre ce que l’on pourrait appeler les « effets pervers » de l’écriture, à savoir notamment affaiblir la mémoire et scléroser la pensée. Le maître de Platon, le philosophe Socrate, ne nous a laissé quant à lui aucune œuvre écrite, mais il est passé à la postérité comme le philosophe qui ne pouvait penser qu’au travers du dialogue et de la parole vivante. Comment se peut-il que notre système d’enseignement soit devenu aujourd’hui si dépendant de l’écrit, si attaché à la lecture et à l’interprétation des textes, au détriment du dialogue et de la prise de parole vivante?

    Il est vrai que l’Ecole française a fait le choix de valoriser les travaux écrits de façon quasi-exclusive et elle a bien souvent relégué les épreuves orales à un rang subalterne – comme en témoigne le fameux « oral de rattrapage » du baccalauréat, c’est-à-dire un ensemble d’épreuves orales qui permettent de « repêcher » les candidats ayant été recalés aux épreuves écrites. Seules les langues dites « vivantes » ont eu jusqu’à présent en charge de développer la prise de parole chez les élèves de l’enseignement secondaire français.

    Dans ce contexte, la réforme du baccalauréat voulue par le ministre de l’Education Nationale, Monsieur Jean-Michel Blanquer, introduit un changement profond, on peut même dire : une véritable révolution de la philosophie éducative française qui était centrée jusqu’ici sur la prééminence de l’écrit. Un ancien inspecteur général et expert en éducation, Roger-François Gauthier, a souligné dans une tribune du Monde (publiée le 15 octobre 2019) la « force de la nouveauté » liée à cette réforme qui consiste, au fond, à « changer le positionnement symbolique de l’oral » au sein du système éducatif français.

    Les modalités pratiques de cette nouvelle épreuve du baccalauréat, qui sera inaugurée cette année scolaire, ont été définies dans une note du Bulletin officiel de l’Education Nationale du 13 février 2020. Cette épreuve, qui sera précédée d’un temps de préparation de vingt minutes, durera elle-même vingt minutes, qui se décomposeront en trois temps comme suit :

    1°) cinq minutes d’exposé oral, debout et sans notes, devant un jury composé de deux professeurs (de deux disciplines différentes, dont l’un doit obligatoirement enseigner la discipline de spécialité du candidat) – l’exposé consistant à présenter une question choisie par le candidat entre deux questions proposées par le jury, et portant sur un des deux enseignements de spécialité de Terminale (ou bien sur les deux enseignements de spécialité conjointement) ;

    2°) dix minutes d’entretien entre le candidat et le jury, portant sur le programme des spécialités suivies par le candidat en Première et en  Terminale ;

    3°) cinq dernières minutes d’échange, durant lesquelles le candidat doit synthétiser la discussion afin notamment de préciser son projet d’orientation concernant la suite de ses études et/ou un éventuel projet professionnel. Cette épreuve obligatoire pour tous les candidats sera notée sur vingt points et figurera parmi les cinq épreuves finales du baccalauréat (aux côtés du français, en Première, de la philosophie et des spécialités 2 et 3, en Terminale) et comptera, parmi les autres épreuves, à raison d’un coefficient 10 en voie générale (contre un coefficient 10 en français, 8 en philosophie et 16 pour chacune des deux spécialités).

    Grand oral du bac

    Les exigences de l’épreuve sont définies également dans la note du B.O.E.N. du 13 février 2020 : il y est ainsi souligné que le candidat doit « montrer sa capacité à prendre la parole en public de façon claire et convaincante », à « utiliser les connaissances liées à ses spécialités pour démontrer ses capacités argumentatives » et enfin à démontrer « la maturité de son projet de poursuite d’études, voire professionnel ». Ces exigences traduisent ainsi tout particulièrement la volonté de développer et valoriser la prise de parole orale des élèves, conformément à l’esprit et à la lettre du rapport : « Faire du grand oral un levier de l’égalité des chances », remis le 24 juin 2019 par Monsieur Cyril Delhay, professeur d’art oratoire à Sciences Po Paris, au Ministre de l’Education Nationale, Monsieur Jean-Michel Blanquer.

    Dans ce rapport, Monsieur Delhay écrivait ainsi, en introduction de son mémoire: « La mise en place du grand oral du baccalauréat dans les voies générales et technologiques comme la présentation du chef-d’œuvre dans la voie professionnelle donnent une opportunité historique. L’objectif est que tout élève issu du système scolaire français sache non seulement parler en public mais s’y exerce avec plaisir.

    Que chacun(e) trouve, dans la pratique de l’oral en classe et dans les dynamiques de groupe qu’elle suscite, un chemin personnel de progression et, dans l’élaboration, l’interprétation et l’incarnation de sa parole en public, un moyen d’être soi ». Dans le cadre de la préparation à cette nouvelle épreuve, l’accent devra donc être mis non seulement sur l’aisance verbale et oratoire du candidat, mais également sur son aisance posturale, sur le placement de la voix ainsi que sur le langage non verbal (tenue vestimentaire, mimiques, gestuelle etc.), ou encore sur la conscience de la respiration et la gestion du stress en situation d’examen, de sorte que la performance de l’élève apparaîtra comme une prestation totale impliquant non seulement l’esprit mais également le corps, non seulement l’aptitude au discours rationnel et argumenté mais également la maîtrise des émotions, et ce afin de se montrer pleinement persuasif devant le jury.

    On notera au passage que Monsieur Delhay s’appuie en outre, dans son rapport de 2019, sur l’apport scientifique récent des neurosciences afin de rappeler l’importance de la coordination entre la pensée et le corps, entre la prise de parole et l’engagement physique du candidat.

    Quels sont les aspects qui peuvent sembler positifs, mais aussi les aspects qui peuvent éventuellement susciter des inquiétudes au sujet du « grand oral » ? Et qu’en est-il, plus particulièrement, de la question de l’égalité des chances soulevée par le rapport Delhay, qui inspire la réforme du baccalauréat et la création de cette nouvelle épreuve ? Du côté des apports incontestablement positifs, on retiendra : l’éveil d’une pensée vivante et spontanée reposant sur la maîtrise du discours oral, la promotion de l’interdisciplinarité, la valorisation d’une compétence, la prise de parole orale, qui est extrêmement utile socialement et professionnellement, ou encore la réévaluation d’une exigence démocratique fondamentale, à savoir : l’engagement des individus et des futurs citoyens dans le débat public et politique.

    Du côté des inquiétudes, on mentionnera : le danger du formalisme (il convient de veiller à ce qu’une codification excessive de l’épreuve ne nuise pas à la spontanéité de l’oral), le caractère intimidant du « grand oral », une épreuve inspirée des concours d’entrée aux grandes écoles les plus prestigieuses, ou encore le caractère socialement discriminant d’une épreuve qui fait appel à des compétences qui relèvent bien souvent de l’héritage familial. Sur ce dernier point, toutefois, il convient de nuancer : s’il est vrai que l’expression orale obéit à des codes sociaux qui sont inégalement maîtrisés en fonction des milieux sociaux d’où proviennent les candidats, tout l’enjeu de la formation au « grand oral » sera précisément de corriger les inégalités en préparant spécifiquement aux exigences de cet examen d’un nouveau genre.

    Comme l’écrit Madame Marie Duru-Bellat, professeur émérite en sociologie à Sciences Po et spécialiste des questions d’éducation, dans le journal Le Monde (23 février 2018) : « Ce n’est pas parce qu’une épreuve est discriminante qu’il faut la supprimer. Selon qu’ils ont plus ou moins de vocabulaire en entrant à l’école, les élèves ne sont pas égaux devant la lecture par exemple. Mais on ne va pas renoncer à l’enseigner ! La question est de savoir ce que l’on veut que les élèves sachent. S’ils doivent maîtriser l’expression orale, il faut les y former. C’est une décision politique ».

    Ainsi, la préparation au Grand Oral devra répondre à ces inquiétudes et permettre de relever le défi de l’égalité des chances, en proposant aux élèves de classe de terminale un enseignement adapté aux exigences de cette épreuve.

    Par Jean-Claude Poizat, professeur agrégé de philosophie, docteur en Sciences politiques à Sciences Po Paris et professeur à Ipesup.

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    « Comment l’homme parle-t-il de l’animal ? » – Christophe Cervellon analyse le thème de culture générale en prépa HEC

    Pour Le Figaro Étudiant, Christophe Cervellon, professeur de Culture Générale à Ipesup, répond à une question éclairant le thème de culture générale du concours 2021 pour accompagner les étudiants dans leurs révisions : « Comment l’homme parle-t-il de l’animal ?« .

    Retrouvez l’intégralité de cet entretien sur Le Figaro Étudiant.

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    La rédaction vous propose :

    PRÉPASUP propose des stages de préparation aux tests SAT et ACT permettant d’entrer en première année dans une université américaine (« freshman admission »), mais aussi dans de nombreuses institutions dans le monde (La Bocconi, …). Les scores de ces deux tests sont acceptés par la totalité des université américaines mais le SAT est le plus accessible pour des étudiants français.

    Le prochain week end de stage aura lieu les 12 et 13 septembre 2020

    Repères pratiques
    Pour quiÉlèves de Première et de Terminale.
    Cours15h30 de cours :

    • Anglais 3 x 2h
    • Mathématiques 3 x 2h
    • Test blanc 3h30
    Dates
    • Samedi 12 et dimanche 13 septembre 2020.
    LieuxNos stages présentiels ont lieu dans nos centres d’enseignement situés dans le 4ème ou le 5ème arrondissement de Paris. Ce stage est aussi proposé en version digitale en direct à distance sur les mêmes horaires
    Tarifs350 €


  • Stages intensifs week-end spécial SAT