Ma vie en école – Camille*, en première année de programme général à Sciences Po Paris, campus de Paris
Pour commencer, est-ce que vous pouvez vous présenter ?
Je m’appelle Camille*, je viens d’un lycée privé catholique de province, où j’étais en Internat. En Première, j’avais pris les spécialités Mathématiques, SES et HGGSP et, en Terminale, j’ai choisi de poursuivre SES et Mathématiques en plus des options Maths expertes et latin. J’avais candidaté à 3 cursus potentiels : le programme général de Paris, pour lequel j’ai été pris, le double diplôme en histoire avec la Sorbonne, car l’histoire m’intéressait beaucoup, et le celui avec la Freie université de Berlin en lien avec le campus de Nancy, en raison de mon cursus bilangue anglais-allemand depuis la 6ème.
Avez-vous une expérience internationale ? Êtes-vous êtes bilingue ?
Ma famille est purement française. Je n’ai pas eu le même accès aux langues que d’autres ont pu avoir, mais j’ai eu la chance de partir 3 mois seul en intégration scolaire en Nouvelle-Zélande, en Seconde. Cela m’a permis d’être quasiment bilingue à l’oral en anglais. Par la suite, dans le cadre de la préparation IPESUP, j’ai passé le Cambridge niveau C1.
Comment s’est passée votre rentrée ?
Notre génération, avec la réforme du concours de Sciences Po, a vu apparaître des listes d’attente pour entrer au Collège Universitaire. J’ai été sur liste d’attente, et in fine admis. J’ai donc vécu un stress intense qui s’est finalement soldé par un immense soulagement.
Une fois admis, nous avons été mis en contact avec différents étudiants de Sciences Po pour faire les inscriptions administratives début juillet et nous sommes rentrés la dernière semaine d’août, durant la semaine d’intégration. Les associations étaient très présentes : on se souvient tous plus ou moins du premier amphi où les associations se sont présentées et où elles ont commencé à faire différentes animations. C’était vraiment sympa !
Est-ce que Sciences Po correspond à vos attentes ?
Je ne m’attendais absolument pas à assister à la comparaison du régime présidentiel avec le Schtroumpfissime par Monsieur Guillaume Tusseau, ni à voir mon professeur d’histoire nous proposer l’interlude d’une comédie musicale montrant Hamilton et Jefferson rapper pour parler de la Constitution et des libertés sur la question de l’esclavage. C’était exceptionnel ! Je pense que très peu d’Ecoles proposent ce genre de chose.
En adoptant un regard un peu rétrospectif, comment avez-vous vécu votre préparation à Sciences Po à l’aune du nouveau concours ?
Le changement d’épreuves a été quelque chose de difficile à gérer, quand même. J’avais commencé à travailler début Toussaint. J’avais fait le pari de me baser sur l’ancienne lettre de personnalité et de motivation demandée par Sciences Po et ça a été assez problématique puisqu’ils ont changé 3 à 4 fois les modalités durant l’année. Par conséquent, j’ai dû rédiger un nombre incalculable de versions des EP.
Que pensez-vous de la réforme et de la polémique qu’elle a suscitée ?
J’ai eu des échos d’amis qui étaient dans de grands lycées parisiens, où personne n’a eu Sciences Po à cause des dossiers. Dans mon lycée, on a eu le même problème. Et aujourd’hui, à la suite de la baisse spectaculaire des intégrations, les professeurs commencent à revoir leur politique de notation.
Qu’est-ce que vous redoutiez en préparant le concours ?
L’oral. Dans mon cas, l’analyse d’image m’a vraiment marqué puisqu’ils m’ont parlé de sujets qui n’avaient rien à voir avec la photo et que je ne comprenais pas quels étaient les liens. Heureusement, les nombreux oraux blancs d’IPESUP m’ont permis de savoir quoi répondre aux questions vraiment déstabilisantes, de faire face à des changements dans l’organisation de l’oral et ont développé chez moi une vraie capacité d’adaptation.
Comment se sont passés vos oraux ?
C’est beaucoup plus facile quand on a déjà passé … peut-être … 6 oraux blancs ! J’en avais même passé 2 en Première… J’ai eu 2 images le jour du concours. La première était un dessin ; la deuxième était une photographie d’art intitulée « Bolides » : il y avait un enfant dans une voiture dans les rues de Paris qui portait un képi et qui regardait une autre voiture sur la route qui avait brûlé.
Qu’est-ce que vous en retirez comme expérience ?
Qu’il faut apprendre à relativiser ! Se dire que j’étais fier de ce que j’avais accompli et du chemin parcouru, quelle que soit l’issue de l’oral.
Sur la continuité pédagogique, diriez-vous que ce que vous avez appris à IPESUP vous est encore utile maintenant que vous êtes à Sciences Po ?
A Sciences Po, il y a beaucoup d’exposés à faire en cours ! C’est vraiment la pédagogie par les exposés. Par exemple, cette semaine j’avais un exercice d’uchronie à faire en histoire (« Et si les révolutions de 1848 avaient échoué à Paris ? ») et j’avais le surlendemain un exposé sur Guernica de Picasso.
Pourquoi avoir choisi IPESUP ?
Intégrer Sciences Po est une idée que j’avais de longue date. Pour l’anecdote, quand j’étais en CE2, la maîtresse nous a demandé ce que nous voulions faire plus tard et, sur le coup, j’ai dit « heu, … président de la République » ! (Rires) En fait, j’ai toujours eu dans l’idée de faire Sciences Po et, en fin de seconde, j’ai cherché ce qui existait en termes de formation.
Qu’est-ce qui vous a marqué dans la prépa ? Votre meilleur cours, professeur ou intervenant ?
Un des souvenirs marquants a été la conférence d’un grand diplomate, qui fut le conseiller spécial de François Mitterrand à l’Elysée pendant les deux septennats. Il a posé une question sur une photo historique** et j’ai dû me lever pour répondre. Quand il a commencé à me questionner devant un amphi de plus 100 personnes, c’était très impressionnant, et à vrai dire, à la fin, je ne tenais plus debout ! Ce sont vraiment des expériences qu’on ne peut pas avoir ailleurs.
Quel conseil donneriez-vous à un ou une élève qui souhaiterait rejoindre Sciences Po ?
Je conseillerais de ne pas tarder à se mettre à la rédaction des EP, vu le nombre de fois où je les ai repris… Et en même temps, il faut accorder une énorme importance au travail scolaire qui a remplacé les épreuves sur table d’un concours commun.
Un mot de la fin ? Quelque chose vous aimeriez dire aux lycéens et lycéennes qui vont découvrir votre portrait ?
Ne désespérez pas ! Le processus de préparation peut paraître compliqué, on a parfois l’impression qu’il faut avoir créé une start-up, jouer du piano comme Mozart ou avoir fait 10 milliards d’activités différentes … mais c’est tout à fait possible d’entrer à Sciences Po. !
* Le prénom a été modifié.
** Il s’agissait de la photo du chancelier allemand Kohl et du président Mitterrand, main dans la main devant l’ossuaire de Douaumont, près de Verdun, en 1984 : ce que l’on a appelé le « geste de Verdun » (NdA).