DSCG Concurrence déloyale : commentaire d’arrêt
Cass. com., 3 mars 2021, n° 18-22.804 (Concurrence déloyale)
Dans le cadre de ses préparations au DSCG, Ipesup propose un commentaire des principaux arrêts en relation avec le programme de Droit en UE 1, par Stephen ALMASEANU, vice-procureur chargé des affaires commerciales au tribunal de commerce de Paris, professeur à l’Ipesup.
(Contrats, concurrence, consommation, mai 2021, comm. 78, obs. M. Malaurie-Vignal)
L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 3 mars 2021 permet de revenir sur les notions de contrefaçon de marques, d’imitation et surtout de parasitisme.
En l’espèce, une société extrêmement connue dans la fabrication et la commercialisation de chocolat s’était rendue compte, lors d’un salon international, qu’une autre société, bien moins connue, commercialisait des produits dont certains ressemblant fortement aux siens. Le chocolatier renommé attaqua donc son concurrent tant sur la contrefaçon de marques et l’imitation que sur le parasitisme.
Sur la contrefaçon et l’imitation, il y a peu à dire : les éléments factuels ont été jugés comme n’étant pas de nature à entraîner une quelconque confusion dans l’esprit du public.
La Cour d’appel n’avait pas non plus retenu la qualification de parasitisme, considérant qu’aucune captation de clientèle ou d’investissement n’avait été démontrée, faute d’ailleurs de démonstration d’une quelconque commercialisation ou offre de commercialisation. Au fond, seule la lecture du catalogue de la société moins connue démontrait cette « inspiration », sans qu’on sache si cela avait été suivi de ventes.
Sur ce dernier point, l’arrêt de la cour d’appel fait, à juste titre, l’objet d’une cassation : « la présentation, lors d’un salon international, de marchandises et la distribution d’un catalogue présentant ces marchandises sont, malgré l’absence de commercialisation ou d’offre de commercialisation, susceptibles de constituer des actes de parasitisme si ces marchandises reprennent les éléments de présentation caractéristiques de produits notoires ».
La décision permet de rappeler la spécificité de la notion de parasitisme, laquelle n’exige pas, rappelons-le, qu’il existe une situation de concurrence entre les sociétés concernées.
Selon une jurisprudence désormais bien établie, le parasitisme consiste à sa placer dans le sillage d’un agent économique pour profiter de ses investissements, même, donc, si on ne lui porte nullement concurrence. L’utilisation d’une présentation, d’un nom, etc. peut ainsi être susceptible d’être qualifiée de parasitisme, peu importe que cela entraîne une confusion dans l’esprit du public. Ainsi, dans le fameux arrêt condamnant pour parasitisme Yves Saint-Laurent pour avoir lancé son parfum « Champagne » – « pour femmes heureuses, légères et qui pétillent » affirmait le slogan -, la Cour d’appel de Paris avait reproché à celui-ci d’avoir détourné une notoriété qui découlait de décennies d’investissements effectués par les grands producteurs de Champagne (CA Paris, 5 décembre 1993).
C’est bien cette notion qui est ici appliquée par la Cour de cassation : peu importe qu’il y ait eu commercialisation, captation de chiffre d’affaires ou désorganisation des réseaux de distribution : s’il y a présentation des chocolats litigieux faite en s’inspirant tellement de la marque connue – notamment en reprenant ses éléments évocateurs – qu’on peut considérer que le but est de se placer dans le sillage de cette marque et de bénéficier de ses investissements passés, il y aura bien parasitisme.
C’est donc ce que devra prouver la société exploitant la marque devant la cour d’appel de renvoi.