Dans une interview donnée au Figaro Etudiant le 18 décembre 2019, le directeur du programme Grande École de l’ESSEC, Monsieur Félix Papier, dévoile pour la première fois les statistiques d’admissions sur titres. Il annonce « 130 places » pour 2020 – et c’est plutôt une surprise « à la baisse » pour le secteur (voir ci-dessous). C’est l’occasion pour le groupe IPESUP d’analyser la sélectivité des 3 meilleures Business Schools françaises en admissions parallèles (HEC, l’ESSEC, l’ESCP Europe), mais aussi de comparer la sélectivité des différentes voies d’admission. Même si on parle beaucoup du « développement des admissions parallèles » – une réalité pour certaines Écoles de milieu de classement – le tableau est nettement plus contrasté qu’il n’y paraît pour les écoles du top-3.

A HEC, 25 places en Admissions parallèles contre 400 au niveau « prépa »

S’il est vrai que les admissions internationales, les doubles diplômes, et les offres de formation de type MSc/Mastères spécialisés se sont fortement développées ces dernières années à HEC, la meilleure Business School d’Europe continue de protéger son Programme Grande École.

Sur 16 intégrés à HEC après un parcours académique en France, 15 sont issus de la prépa

Avec une régularité métronomique depuis la disparition en 2017 du concours CAD (Concours d’admission directe, autrefois commun avec l’ESCP Europe), HEC Paris admet chaque année 25 élèves seulement par la voie des admissions sur titres françaises. C’est objectivement 16 fois moins que le nombre de places par la voie des classes préparatoires (400 en 2019).

Comme toutes les écoles du top-5 (à l’exception de l’ESSEC, voir ci-dessous), HEC propose une admission à Bac +3. Le processus de sélection repose sur l’examen minutieux du dossier universitaire, agrémenté d’une lettre de motivation, de questions auxquelles le candidat doit répondre (exemple en 2020 : qu’est-ce qu’un leader pour vous ?), et des résultats aux tests standardisés TAGE MAGE® (compétences générales) et TOEIC® (anglais).

Un taux de sélectivité de 3 % par la voie des admissions sur titres, deux fois et demi plus strict que celui du concours prépa (7,5 %)

Si HEC ne communique pas sur son nombre de places, on peut en fournir une estimation à partir de quelques données simples :

  • on sait qu’il y a entre 700 et 1000 candidats à l’ESSEC chaque année en admissions sur titres (annonce du directeur du PGE de l’ESSEC dans l’article du Figaro Etudiant) ;
  • l’admission à HEC est ouverte dès le niveau Bac +3, ce qui augmente significativement le nombre de candidats potentiels par rapport à l’ESSEC (qui se limite, elle, à la population de niveau Bac +4) ;
  • a contrario, on sait qu’à niveau d’études identique, un certain nombre d’étudiants candidats à l’ESSEC ne présentent pas HEC car ils ont conscience du taux de sélectivité plus fort. Ce phénomène se retrouve d’ailleurs au niveau « prépa », où le nombre de candidats à HEC est de 10 % inférieur à celui de l’ESSEC (5248 candidats à HEC en 2019 contre 5843 candidats à l’ESSEC) ;
  • il y avait autrefois 600 candidats à l’unique session du concours d’HEC (le « CAD », partagé avec l’ESCP Europe), à l’époque où des épreuves écrites et orales très difficiles décourageaient certains élèves ; depuis, la sélection se fonde uniquement sur le dossier et les tests, et 4 sessions d’admission sont ouvertes chaque année. Ce mouvement a contribué à augmenter significativement le nombre de candidats.

Au total, on peut raisonnablement estimer, de manière conservatrice, à environ 800-850 le nombre de candidats à HEC en admissions parallèles. Un rapide calcul donne un taux de sélectivité de l’ordre de 3 % pour les admissions sur titres françaises à HEC, une sélectivité objectivement deux fois et demi plus forte que celle du concours prépa à 7,5 % (400 places pour 5248 candidats en 2019 selon les statistiques officielles SIGEM).

Un recrutement élitiste nécessitant une préparation minutieuse

Avec 25 places pour toute la France, la meilleure Business School d’Europe se met en position de poursuivre son recrutement élitiste. Pourquoi admettre un candidat universitaire tout juste « bon » qui aurait 13/20 de moyenne en L3, quand HEC Paris peut se permettre de sélectionner en quelque sorte « les deux meilleurs candidats issus de Sciences Po », « les deux meilleurs d’Assas », « le meilleur de Dauphine », « le meilleur candidat de Centrale Paris », etc… Le niveau académique des admis universitaire est très élevé, et les candidats devront présenter des top-scores aux tests TAGE MAGE® et TOEIC®.

Un de nos anciens élèves en admissions parallèles à IPESUP, lui-même issu de Sciences Po avec 15,5/20 de moyenne générale et ayant obtenu « seulement » 390 points au TAGE MAGE® (un score solide, difficile à obtenir), a par exemple dû s’en expliquer à l’oral d’HEC : « Dites-nous Monsieur, le TAGE MAGE®, ce n’est pas trop votre truc ? Comment expliquez-vous votre score, vous n’aimez pas trop les maths peut-être ?« . Sa finesse à l’oral lui aura finalement permis d’être admis.

On comprend bien qu’aujourd’hui, une admissions sur titres à HEC ne peut se fonder uniquement sur un bon dossier universitaire et une « bonne lettre de motivation ». Une lettre de motivation excellente devra en fait soutenir un dossier universitaire très solide. Le candidat aura tout intérêt à présenter les meilleurs résultats nationaux aux tests standardisés.

Décembre 2019 : l’ESSEC dévoile pour la première fois ses statistiques en admissions sur titres

130 places seulement !

Dans une interview donnée au Figaro Etudiant le 18 décembre 2019, le directeur du programme Grande École de l’ESSEC Business School, Monsieur Félix Papier, dévoile pour la première fois les statistiques d’admissions sur titres – et c’est plutôt une surprise pour le secteur. Nos informations et estimations nous conduisaient jusqu’à présent à évaluer le nombre de places à 150-180 (d’autres instituts moins conservateurs que nous évoquaient jusqu’à 265 places…) ; c’est en fait seulement 130 places qui sont ouvertes en admissions sur titres à l’ESSEC en 2020, contre 420 par la voie des classes préparatoires.

15 % seulement de la promo de l’ESSEC Grande Ecole issue des admissions sur titres françaises

M. Papier opère dans l’article une nette distinction entre les candidats internationaux et les candidats français (ce critère s’entendant au sens du cursus suivi, la nationalité n’ayant, dans les deux cas, aucune incidence) :

  • 55 % des élèves du Programme Grande École demeurent issus des classes préparatoires
  • 15 % seront issus des admissions sur titres françaises (niveau Bac +4 et plus)
  • le reste, c’est-à-dire 30 %, des admissions internationales

Il faudra ajouter à cela les doubles diplômes avec des universités partenaires, notamment à l’international (l’article ne mentionne pas si ces candidats sont ou non inclus dans les 30 % d’admissions internationales et on peut émettre l’hypothèse que non), mais qui une fois de plus ne concernent pas les admissions sur titres avec diplôme français.

Un taux de sélection analogue à celui de la prépa

L’ESSEC publie aussi pour la première fois le nombre des candidats qui se présentent au Programme Grande Ecole par la voie des admissions sur titres : « entre 700 et 1000 candidats ». En considérant le milieu de cette fourchette (850 candidats), on parvient à un taux de sélection de 15 % en admissions sur titres françaises. Notre intuition est d’ailleurs qu’il y a plutôt 900-950 candidats que 800, ce qui donnerait un taux plus proche de 14 %.

Si l’on compare au concours prépa, l’ESSEC propose certes 420 places pour 5843 candidats soit un taux d’intégration de 7 %, mais nombreux sont les élèves de classes prépa à être admis à la fois à l’ESSEC et à HEC (la quasi-totalité d’entre eux optant alors pour HEC). C’est pourquoi l’ESSEC a admis jusqu’au 753ème candidat de niveau prépa l’an dernier (SIGEM 2019), soit un taux d’admission réel de 13 % au niveau prépa.

Les admissions parallèles ne sont quant à elles pas tellement concernées par les reports d’admissions de l’ESSEC vers HEC pour deux raisons :

  1. Le nombre de places à HEC demeure très faible (25), ce qui limite par définition le nombre de bi-admis
  2. HEC recrute dès le niveau Bac +3 quand l’ESSEC restreint son admission à la population des Bac +4 et plus

Ces deux éléments rendent l’intersection des admis à HEC et à l’ESSEC non significative eu égard au nombre de places proposées (130), le ratio nombre de places / nombre de candidats est donc un indicateur pertinent pour l’analyse de la sélectivité.

Pour conclure, les taux d’admission à l’ESSEC Grande Ecole sont objectivement très proches entre les deux voies d’admissions françaises, d’autant plus que les universitaires de niveau Bac +4 ou Bac +5 sont eux-mêmes passés par les filtres de processus sélectifs en amont de leur candidature à l’ESSEC : intégration d’un grand établissement (qu’il s’agisse d’une Grande École Ingénieurs, d’un master sélectif d’une université comme Paris IX-Dauphine ou encore de Sciences Po), réussite des études universitaires avec mentions…

Des statistiques stables dans le temps

M. Papier évoque non seulement un taux stable depuis les cinq dernières années, mais aussi en creux une stabilité à venir des admissions sur titres dans les processus de sélection au niveau de la Grande École : « Nous faisons en sorte de recruter des étudiants aux profils variés tout en gardant une grande exigence, nous avons trouvé notre équilibre« .

Pour mémoire, le nombre de places à l’ESSEC après classes préparatoires est d’une stabilité remarquable au cours du temps. Entre 2010 où l’ESSEC proposait 365 places (source) et 2019, où 420 places étaient proposées, le nombre de places ne s’est accru que de 15 %, soit d’un modeste 1,4 % par an, correspondant d’ailleurs peu ou prou à l’évolution du nombre de candidats (+ 23%, de 4710 en 2010 à 5843 en 2019) ; la sélectivité s’est même légèrement accrue.

Dans un contexte où le nombre d’élèves inscrits en classes préparatoires commerciales est stable et même en légère baisse, compte tenu du ratio que l’ESSEC annonce vouloir maintenir, les candidats doivent donc s’attendre au mieux à une stabilité du nombre de places en admissions sur titres à l’ESSEC pour les prochaines années.

Pour conclure, si l’on met à part la voie internationale (laquelle représente en tout 30 % des admis au niveau de la Grande Ecole, mais où on notera que les Français sont en compétition avec toutes les autres nationalités), la voie la plus sûre pour intégrer le Master in Management (MiM ou Programme Grande Ecole) de l’ESSEC Business School reste selon nous la classe préparatoire.

 

L’ESCP Europe ouvre timidement 50 places au Concours d’admission Directe en 2020

L’ESCP Europe, classée troisième meilleure École de commerce française dans tous les classements depuis plus de 30 ans, se situe entre HEC et l’ESSEC en terme de nombre de places en « admission directe » (nom que donne l’ESCP Europe pour désigner une admission sur titre). Il a pu évoluer entre 30 et 60 places les dernières années. Pour 2020, 50 places seront réservées : c’est deux fois plus qu’en 2018, mais l’ESCP ne fait que revenir aux 50 places de l’ancien « CAD » autrefois partagé avec HEC (exemple ici avec un article L’Etudiant de 2014). Dit autrement, il n’y a pas eu une place de plus en 10 ans !

L’école ne publie pas de statistiques sur le nombre de ses candidats depuis la disparition du concours commun avec HEC, mais une analyse analogue à celle que nous avons produite pour HEC ci-dessus tend à démontrer que le taux de sélectivité à l’ESCP Europe (en ce compris, cette fois, les désistements éventuels des bi-admis au profit de HEC Paris) est lui aussi plus strict qu’en classes préparatoires.

Un taux de sélectivité de l’ordre de 6-7 % en Bac +3, contre 18 % pour les élèves de prépa

Pour mémoire (tableau SIGEM 2019), 17,7 % des élèves de prépa sont admis à l’ESCP Europe (1102 admis pour 5950 candidats). En retenant toujours une population de l’ordre du millier de candidats à l’ESCP Europe (identique à celle d’HEC en admissions parallèles, voir ci-dessus) et en agrégeant le nombre de places à HEC + ESCP Europe (considérant que les bi-admis intégreront tous HEC), le taux de sélection de l’ESCP Europe en admissions sur titres se situe quelque part entre 5% (au sens strict) et 7,5 % (tenant compte des désistements). Ce dernier taux ne serait atteint que si 100 % des admis à HEC étaient aussi admis à l’ESCP Europe – hypothèse audacieuse. Rappelons ici que l’ESSEC n’est accessible qu’à Bac +4 et qu’elle ne vient pas concurrencer HEC et l’ESCP au niveau L3, mais seulement au niveau M1. In fine, nous estimons à 6-7 % le taux d’admission de l’ESCP Europe au Concours d’Admission Directe. Une fois encore, le taux de sélectivité réel des admissions sur titres est deux à trois fois plus strict que celui des classes préparatoires.

En tout, 205 places en AST aux Parisiennes en 2020, contre 1215 pour les préparationnaires

HEC, l’ESSEC et l’ESCP Europe offriront en tout 205 places en 2020 en admissions sur titres avec diplôme français, contre 1215 places pour les candidats des classes préparatoires. Si d’autres Ecoles comme l’EM Lyon (480 places) ou SKEMA (350 places) sont plus ouvertes aux universitaires voire aux diplômés des Bachelors, les chiffres parlent d’eux-mêmes. S’agissant du Programme Grande École (car ce n’est pas le cas des autres programmes type MSc/Mastères spécialisés) le trio de tête protège effectivement la sélection en classes préparatoires, en étant encore plus sélectif en admissions sur titres.

Les étudiants universitaires méritants qui opteront pour la voie des admissions sur titres devront fournir un score élevé aux tests et le meilleur dossier possible, en particulier démontrer la cohérence d’une personnalité et d’un projet à travers les éléments de motivation ou soft skills. Une préparation au concours d’admissions sur titres est proposée par IPESUP, leader depuis plus de 30 ans sur les préparations aux concours les plus sélectifs de l’enseignement supérieur.

Antoine Lamy



  • Les Parisiennes, toujours plus sélectives en AST